mardi 30 juin 2009

Manger sans OGM : mission impossible ?

Dans le déluge de marques, de compositions, de transformations, de filières et de systèmes de traçabilité, comment le pékin moyen comme moi peut-il réussir à manger autre chose que des aliments à base d'OGM dont personne ne sait si elles sont ou non nocives pour notre santé ? Dit comme cela, ça a l'air impossible. Mais en fait c'est surtout une question d'organisation et de bon sens.

Qu'est-ce que je mange ? Pas ce que je mange tous les jours mais plutôt dans quelle catégorie de mangeur peut-on me classer ? Omnivore ? Pas vraiment ! Je ne mange pas d'insectes (ou très peu), pas de reptiles, pas vers, etc. En y réfléchissant, je ne mange pas tant de choses que ça. Et la plupart des choses que je mange sont rangées dans la plupart des rayons de supermarchés ou bien aux étales de marchés. On prend assez vite conscience que notre régime alimentaire est limité. Il est circonscrit dans le périmètre définit par l'industrie agro-alimentaire. Et comme son nom l'indique, elle s'articule sur l'agriculture (les produits de la terre) et sur l'industrie (la production de masse). Donc par déduction, la majeure partie de ma nourriture est faite à base de produits agricoles. Et quand je mange de la viande, la bête a été nourrie de produits de la terre elle aussi.

Alors qu'est-ce que je mange ? Essentiellement, des céréales. Il y en a partout. Dans le pain bien sûr, mais aussi dans les gâteaux, dans les pâtes, dans les aliments des animaux que je mange. Ensuite, du lait. Ça aussi, il y en a partout. Ensuite de la viande, surtout en France. Bœuf, poulet, canard, agneau, cochon, mouton, lapin, etc. qui eux-mêmes ont essentiellement mangé des céréales et du lait (pour les mammifères). Quand vous êtes soucieux de votre santé, vous mangez aussi des légumes, ce qui introduit une grande variété dans l'alimentation et pas seulement un complément comme le pensent beaucoup. Et puis il y a les fruits et les agrumes qui étendent d'autant la variété. Mais la plupart des enquêtes de consommation confirment que ces deux dernières catégories, de par leur prix et leur place minoritaire au sein de la grande distribution, sont largement minoritaire dans l'assiette et surtout ils sont confondus avec d'autres aliments. Combien de gens pensent que les pommes de terres et le riz sont des "légumes“ ? Plus qu'on ne le croit.

Dans cette petite liste grossière, j'ai omis certains éléments qui, sans être majoritaires dans l'alimentation, restent des éléments clés de l'industrie agro-alimentaire. Il s’agit de toutes les sortes de graisses et matières grasses qui servent de liant, d’épaississant, et d’agent de texture, de saveur, de tenue, de poids, etc. Ces matières grasses proviennent de plusieurs sources : le lait et les céréales bien sûr mais aussi d’oléagineux notoires comme l’olive, de fruits secs, et, moins savoureux, des graisses animales que nous consommons. Ces dernières sont idéales pour lier les sauces mais aussi pour épaissir le yaourt…

Alors, où sont les OGM dans tout ça ? Et bien tout simplement dans les céréales. Car elles forment la base de la majorité de toutes les nourritures directement ou indirectement. Les laboratoires spécialisés dans la production d’OGM ont également travaillé et commercialisé des légumes, des féculents et d’autres produits en manipulant leur ADN mais ces produits n’entrent pas dans la catégorie industrielle de masse. Ils représentent des produits régionaux, de niche, sur des segments plus limités que les céréales. Les produits au top de la recherche sont le blé, le maïs, le soja, le colza, le riz… Et qui mange ces produits ? L’humanité toute entière et tous les animaux domestiques qui gravitent autour d’elle. Voilà pourquoi ce sont sur ces produits que ce concentrent les grands groupes de semenciers et de fabricants de pesticides.

Alors comment ne pas manger d’OGM ? Il faut pour cela s’assurer que le produit que l’on achète ne contient le moins possible de produits céréaliers et/ou dérivés de céréales. De même, il faut s’assurer que la nourriture des bêtes que nous allons consommer ne contenait pas de céréales modifiées génétiquement. Quels sont les outils à notre disposition ? D’abord et surtout le bon sens. Ensuite l’étiquetage des produits, les labels certifiés et enfin la promesse des vendeurs.

Le bon sens : c’est au producteur et au vendeur de garantir qu’il n’y a pas d’OGM. Il n’y a pas de présomption d’innocence en la matière. Si ce n’est pas écrit, il faut partir du principe qu’il y en a, mais au dessous du seuil attribué par les instances européennes, soit moins de 0,9% du produit. Ce qui veut dire qu’il y en a quand même. Greenpeace et d’autres ONG proposent des guides gratuits à disposition sur leurs sites ou bien dans leurs antennes locales. Et comme, les études sur les OGM sont contradictoires et penchent en faveur soit des fournisseurs, soit des détracteurs, la seule certitude en la matière c’est que nous mangeons tous des OGM mais dans des quantités minimes (soit par contamination, soit par ajout inférieur à 0,9%).

L’étiquetage des produits : c’est pas gagné. Comme je viens de le dire, il n’y a pas d’obligation légale en Europe de mention si le taux d’OGM est inférieur à 0,9%, mais il faut savoir que les produits étrangers n’ont pas d’obligation du tout. On devrait les étiqueter à l’entrée dans l’espace européen, mais la gestion en flux tendu fait que le temps pour certaines associations de consommateurs de porter plainte, le stock a déjà disparu. Donc, il faut se méfier comme de la peste des produits alimentaires d’importation venant de pays où la réglementation n’impose pas de mentionner la présence d’OGM. Autant dire qu’il faut faire du protectionnisme au niveau de la consommation et de l’achat, puisque les distributeurs ne jouent pas franc jeu. L’étiquetage n’est là que pour éventuellement vous renseigner sur la nature et la composition des produits. Il faut avoir de solides connaissances en chimie et une excellente mémoire pour être capable de distinguer un émulsifiant d’un conservateur et de savoir reconnaître celui qui est nocif de celui qui ne l’est pas. L’étiquetage ne vous servira pas à grand chose sinon à reconnaître un label d’un autre.

Les labels certifiés : ils sont de loin, la meilleure information que vous puissiez avoir sur un produit. C’est simple, le label AB certifie l’exclusion des OGM. La plupart des labels Bio garantissent une production en dehors de la filière OGM. Mais attention, des labels prestigieux comme Label Rouge ou Appellation d’Origine Contrôlée n’interdisent pas la filière OGM dans leur cahier des charges (source : Greenpeace). Donc n’espérez pas que AOC vous protège des OGM ou que vos poulets Label Rouge soient nourris avec du maïs non transgénique pour leur donner leur jolie couleur jaune.

Enfin, il y a les promesses des enseignes de distribution : les promesses n’engageant que ceux qui les croient, il vaut mieux se montrer extrêmement prudents. Toutes les enseignes ont des marques qui leur appartiennent et quasiment aucune ne garantit que ses produits soient fabriqués en dehors de la filière OGM. Donc, il convient de mettre un bémol aux promesses de certaines vedettes culinaires lorsqu’elles font la promo des enseignes discount alors qu’aucune d’elles ne donnent de garanties formelles ou tout simplement refusent de se soumettre aux questionnaires d’ONG ou d’institutions chargées de la consommation…

Voilà, en somme et en bref, la mission impossible qui consiste à ne pas mettre d’OGM dans son estomac. Il ne me reste plus qu’à cultiver des patates et des légumes dans un jardin ouvrier ou une petite parcelle locale ou encore dans mon propre jardin. D’y faire pousser des salades, des concombres et des tomates. D’avoir une demi-douzaine de poules pour les œufs et pour une poule au pot en hiver, et quelques lapins et pourquoi pas une vache pendant qu’on y est. Il faudra que j’aille chez Biocoop (enfin de la pub) pour mes céréales, mes légumes secs et mes féculents. Pour la viande ce sera plus difficile et il me faudra m’associer à une trentaine de personnes dans la région pour monter une association et demander à un éleveur bio local de nous abattre un bœuf tous les deux ou trois mois, et pourquoi pas une dizaine d’agneaux… Si j’ai le temps, j’adhère à une AMAP histoire de manger des légumes inhabituels mais sains.

En revanche, si je vis à la ville ou si je pointe au RMI, je suis mal… Il y a de grandes chances que je finisse par ne bouffer que des pissenlits… Par la racine et avant mon heure.

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vendredi 26 juin 2009

Une situation iranienne bien compliquée...

En l'absence de communication réelle avec les iraniens sur place, il est devenu difficile de savoir ce qui se passe là-bas. Et il est évident que l'on ne peut compter sur les médias occidentaux complètement gagnés à la cause du capitalisme néo-libéral.
Ce qui est certain, et cela tous les analystes un peu sérieux le disent, c'est qu'il ne s'agit pas d'une révolution populaire comme nous l'entendons. Le peuple ne se soulève pas contre l'oppression. Il n'est pas uni derrière un leader charismatique et humaniste. Il ne rejette pas la tyrannie.
Je ne vais pas me lancer ici dans un long billet sur l'Iran. Mais en considérant la situation actuelle en Iran, voici quelques clés qui me viennent d'une observation purement bouddhique de l'événement. Par bouddhique, j'entend une vision  qui considère les faits à la lumière du principe de causalité bouddhique, de l'action des gens (karma), de la force d'inertie (obscurité fondamentale) et de l'effet pervers des intérêts personnels et collectifs (les trois poisons) purement égoïstes.
L'Iran est, depuis le renversement du Shah en 1979, un Etat religieux, c'est-à-dire qu'il présente une forme de gouvernement où la religion traditionnelle locale dispose de toutes les prérogatives et des pouvoirs normalement dévolus aux institutions politiques représentatives. C'est un facteur clé qui passe souvent au second plan et que tout le monde oublie tant on a l'habitude de la séparation plus ou moins évidente de l'Eglise et de l'Etat en Occident. En Iran, il n'y a pas de séparation entre l'Eglise et l'Etat. L'Eglise est l'Etat.
En ayant à l'esprit cette condition, il faut également prendre conscience (s'éveiller quoi !) que l'Iran est l'une des toutes première puissances pétrolières et qu'elle ne subit pas comme ce fut le cas pendant longtemps d'isolement économique et financier. Cette marge de manœuvre a été obtenue après une guerre terrible et inutile que tout le monde semble avoir oublié, le conflit Irano-Irakien de 1980 à 1987. Depuis la signature d'une paix fragile en 1990, l'Iran dispose d'une réelle présence régionale et d'une capacité économique mondiale. Cela a été accentué par sa neutralité pendant la première Guerre d'Irak en 1991.
L'Iran n'est donc pas une sorte de pays du tiers-monde, une république bananière sans foi ni loi, livrée à des arriérés sortis tout droit d'un film d'action américain. Mais revenons à nos moutons...
En dépit d'un régime théocratique (dominé par l'Eglise), le peuple iranien est très éduqué (beaucoup plus que nombre de ses voisins directs) et les composantes du gouvernement ne sont pas toutes d'accord sur les moyens et les objectifs du régime gouvernemental. Ces tensions et divergences ne s'expriment pas seulement sur des interprétations de la Charî'a (Loi musulmane), du Coran (corpus de référence théologique) ou des Hadîth (les enseignements oraux du Prophète). Elles portent également sur des principes politiques et sociaux liés à l'éthique, à la citoyenneté, aux représentations de la modernité orientale, etc. Toutefois, tous ces courants s'inscrivent dans la tradition musulmane, c'est-à-dire dans une représentation du monde séparé en deux camps : nous, les fidèles, et les autres.
Dernier point important à avoir à l'esprit en considérant l'hypothèse d'un soulèvement populaire : les événements de 1999. Déjà à cette époque, la société iranienne a été secouée par des remous populaires. Après coup, on a pu mesurer et constater qu'il s'agissait déjà d'une lutte de factions à la fois politiques et religieuses au sein des différentes tendances du pays. A l'issu de ces remous et d'une répression identique à celle que nous apercevons aujourd'hui, la tendance dure et nationaliste de l'Ayatollah Ramenei (flanqué d'un Gardien de la Révolution, M. Ahmadinejad) l'emportait sur des tendances plus libérales (mais tout aussi religieuses et parfois même intégristes) de la classe politique iranienne. Ces tendances se sont fédérées autour de figures politiques qui ont poursuivi un combat essentiellement politique en essayant de gagner à leur cause des religieux influents plus enclins à une réforme de la république islamique vers des modèles plus libéraux comme le modèle turc, l'ancien modèle irakien (et oui !) ou certains modèles du Maghreb (c'est-à-dire occidentaux) comme l'Algérie ou l'Egypte.

En ayant à l'esprit ce panorama rapide et quelque peu schématique, on peut se rendre compte de plusieurs choses :
— Ce qui se déroule n'est pas une révolution populaire, mais bien une contestation politique menée par plusieurs tendances concurrentes à celle qui conserve le pouvoir.
— Un soulèvement populaire n'est possible qu'avec l'aide des religieux, des militaires (et oui, ils sont toujours là eux), ou des chefs politiques les plus forts.
— Les puissances étrangères (U.S. en tête) cherchent depuis longtemps à déstabiliser le pays et à renverser l'actuel régime religieux. Mais englués dans un Afghanistan incontrôlable, pris au piège dans un Irak atomisé et paralysés par des tensions en Afrique orientale, en Corée du Nord et par une crise économique sans précédent qu'ils ont eux-mêmes laissé arrivée, les Etats-unis, comme l'Europe complice, sont dans l'incapacité d'intervenir dans un pays encerclé de montagnes et peuplé de gens qui détestent culturellement le modèle occidental (infligé par le Shah pendant plus de trente ans).

Il est évident que ce qui se joue en Iran fait partie d'un processus d'assouplissement de la doctrine de gouvernement islamique. Mais cela se fait lentement et selon des règles qui nous échappent à nous occidentaux. Le problème est que notre propre situation est difficile pour ne pas dire critique et que le fantasme d'une révolution populaire nous plaît beaucoup. Nous y voyons une sorte d'exutoire de notre propre incapacité, pour ne pas dire impuissance, à transformer nos économies capitalistes cannibales. Nous appelons de nos vœux une révolution populaire ailleurs, dans une contrée imaginaire, mythologique, qui nous donnerait l'illusion de pouvoir, nous aussi, renverser les tyrans et les profiteurs qui nous vampirisent.

Si nous cessons de projeter nos propres fantasmes sur la situation iranienne dont nous ne connaissons finalement que peu de choses et que nous comparons à d'autres événements historiques qui n'ont rien à voir (Tian'anmen, Révolution orange, etc.), nous pouvons observer les rouages et les complexités d'un processus politique et social. Nous voyons émerger un modèle démocratique qui doit faire face aux intérêts particuliers et collectifs de ceux qui détiennent les clés du pouvoir. Nous pouvons en tirer des leçons ou bien continuer de rêver à des chimères révolutionnaires dont le romancier Kirghiz, Chinghiz Aitmatov disait : « Je conseillerais vivement aux jeunes de ne pas trop compter sur une révolution sociale. La révolution est violence et émeutes, folie collective. C’est une violence collective qui apporte d’énormes souffrances à la société toute entière, à un peuple ou à une nation… Je les encouragerais à chercher un moyen de changer les choses sans effusion de sang, de réformer la société à la lumière de la raison. ». (cit. Propositions pour la paix, 26 Janvier 2009, D. Ikeda).

J'espère que ce billet aura éclairé certaines parties de l'actualité Iranienne. Je ne peux aller plus loin, n'étant pas iranien, n'ayant pas d'amis iraniens sur place, et étant tributaire, comme les occidentaux, de la propagande capitaliste pour m'informer sur la question.

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jeudi 25 juin 2009

Des idées... Des mots... Des actes...

Telle devrait être la devise des habitants de cette partie du monde moderne. Pourtant force est de constater que les idées nouvelles sont rares, que les discours innovants sont noyés dans la masse et que les actes sont pour le moins invisibles (sauf à faire comme Ed TV et se tourner en permanence tout en diffusant en continu sur une chaîne Youtube, Dailymotion, Viméo et consorts...). Comment sort-on de ce cercle vicieux ? C'est la question à méditer cette nuit, si toutefois j'arrive à trouver le sommeil.

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